L’origine du Shih Tzu lof

Il est dit que, bien avant notre ère, deux espèces de chiens se côtoyaient en Asie. De leurs croisements successifs furent issus des chiens aux morphologies différentes de celles de leurs ascendants et fallu attendre le travail des éleveurs de Shih Tzulof du XXème siècle pour réellement stabiliser plusieurs races : le lhassa-apso, l’épagneul, le terrier, le chow-chow, le dogue, le pékinois, le Shih Tzu, le carlin …

Quoi qu’il en soit, depuis des siècles, toutes sortes de chiens transitèrent entre la Chine et Tibet grâce aux relations étroites que ces deux pays entretenaient depuis le traité de paix de 823, signé entre le roi tibétain Ralpachen et l’empereur chinois Tang.

On raconte qu’au Tibet les dalaï-lamas (océans de sagesse) successifs s’entouraient de petits chiens or et miel. D’après eux, ils étaient la réincarnation des bonzes et devaient prévenir de l’arrivée du « dieu vivant ». 

En Chine, l’origine des Shih Tzu daterait de 1644, lorsque Pékin fût assiégé par les Mandchous. Ils étaient les chiens de la cour impériale. Ils annonçaient l’approche imminente du souverain et, dès que le peuple les voyait, ils baissaient les yeux en signe de respect.

On commença à parler véritablement de Shih Tzu, à la fin du XIXème siècle, lorsque l’impératrice douairière T’seu-Hi, qui avait déjà des pékinois, décida d’entretenir la race après s’être fait offrir ces petits chiens par le dalaï-lama. Sans parler de standard, tous ses protégés devaient présenter certaines caractéristiques : « Il est petit, paré d’une superbe cape autour du cou et l’ondulation de son dos est visible. Son visage est noir et velu, son front droit et bas. Ses yeux sont larges et vifs, ses oreilles dessinées comme les voiles d’une jonque de guerre et sa truffe pareille à celle du singe sacré des Hindous. »

Ses membres antérieurs sont incurvés. Son corps est semblable à celui du lion qui guette une proie. Ses pieds sont dotés d’une petite touffe de poils qui rendent ses déplacements silencieux. Vif, il divertit par ses bonds et ses cabrioles. Sociable, il peut vivre avec d’autres animaux comme les poissons ou les oiseaux qui vivent au palais impérial. Sa couleur est assortie aux habits impériaux. Il est digne et affronte les diables étrangers.

Tous les sujets qui ne présentaient pas ces qualités étaient vendus au peuple sur les marchés par l’éleveur de Shih Tzu impérial.

A la cour, les eunuques chargés par l’impératrice de soigner et de veiller à la sécurité des Shih Tzulof avaient également une liste de recommandations : « Il faut leur donner à manger des nageoires de requins, du foie de courlis et de la cervelle de caille ». »Il faut leur donner à boire du thé préparé avec les jeunes pousses de petites plantes cultivées dans la province de Hankow ou le lait des antilopes qui paissent dans les parcs impériaux ». »Si l’un d’entre eux est malade, l’oindre avec de la graisse purifiée de pattes de léopard sacré et lui donné à boire une coque d’œuf de grive remplie de jus d’anone, dans lequel il faut dissoudre 3 pincées de poudre de corne de rhinocéros. On doit aussi lui appliqué des sangsues. Ainsi, il guérira, mais s’il meurt, il restera dans notre mémoire comme un chef-d’œuvre mortel. »

Aujourd’hui, le culte d’origine du Shih Tzu a disparu. Avec le développement des voyages et des importations, il a fait le tour du monde et en Chine et au Tibet, il en reste très peu.

Le premier éleveur de Shih Tzu lof en France

En France, la comtesse d’Anjou fut le premier éleveur de Shih Tzu lof dès 1946 et ses premières portées furent déclarées à la société centrale canine (SCC) en 1953.

La comtesse d’Anjou, dont l’époux était en poste à Pékin, élevait à l’origine des Shih Tzu en Chine. Elle réussit à ramener les premiers chiots Shih Tzu en France (qui furent inscrits au LOF), grâce à l’aide d’une amie chinoise, dame d’honneur de l’impératrice T’seu-Hi, la princesse Der-Ling. La comtesse et son mari établirent le même premier standard français, approuvé par l’ambassadeur de France et du Paraguay lequel, ayant passé plusieurs années en Chine, avait possédé plusieurs « tibetan hon dogs » et les avaient même jugé à l’exposition de Pékin. Malheureusement, la comtesse ne pu développer plus avant son travail d’élevage. Sensiblement à cette époque, Mme Naudet, éleveuse de bichons frisés (affixe roi des lutins), en villégiature à Juan-les-pins, découvrit au hasard d’une promenade les petits chiens. Cynophile dans l’âme, Mme Naudet les observa et put échanger avec la propriétaire, la comtesse d’Anjou. Séduite par la race, elle éleva quelques portées de Shih Tzu lof qu’elle acheta en Angleterre.

Puis virent, en 1967, les éleveursde Shih Tzu lof Mme Fontana et ensuite Mme Bosquillon de Genlis. On peut citer un certain nombre de noms d’élevage des années 1980 (certains éleveurs produisent encore) : de Kitchou (Mme Pernier), de la ravine fleurie (Mme Méry), esuldan (Mme Ulrich), de kadidja (Mme Bernard), de dewa tang (Mme Sauzet). De nombreux éleveurs de talents produisent de bons chiens en France, on peut citer notamment Mme Laurent (du domaine des Atlantes) qui comptabilise de très nombreux champions.

Le premier standard français

Le standard d’origine duShih Tzu lof ci-dessous, minutieusement établi par M. et Mme d’Anjou, qui ont fait l’élevage de ces chiens à Pékin pendant de nombreuses années, a été approuvé entièrement par l’éleveur de Shih Tzu Mme Henry Wilden, propriétaire pendant un long séjour en Chine, de très nombreux chiens de cette race et d’une famille de Shih Tzu blancs, qui, hélas, à cause de la guerre, n’ont pas laisser de descendants. Ce standard a reçu également l’entière approbation de M. Maurice Chayet, ambassadeur de France au Paraguay, qui, comme Mme Wilden, a fait un long séjour en Chine, pendant lequel il a étudié ces chiens, en ayant posséder un grand nombre. M. Chayet a été juge de la race aux expositions canines à Pékin.

Apparence générale et caractéristiques

Les Shih Tzu lof sont des chiens abondamment chevelus, au port assez arrogant, très affectifs et très vivants, qui font preuve de beaucoup d’indépendance et de fierté. Ils sont très affectueux et ont beaucoup de personnalité. Ils sont courageux, ne cherchant pas la bagarre, mais se comportant très bien quand ils ne peuvent l’évite. Ils supportent la correction sans sourciller, comme s’ils ne comprenaient pas pourquoi on les châtie. Ils ont l’habitude se coucher sur le ventre, les pattes allongées devant et derrière, de sorte qu’il est parfois difficile de distinguer la tête de la queue tant leur fourrure est épaisse et abondante.

– Tête : large et ronde, très touffue et retombant sur les yeux, barbe et favoris bien fournis, effet de chrysanthème sur la tête.

– Yeux : bien espacés, grands, foncés et cachés par le poil. 

– Museau : carré et court, plat et chevelu, mais pas ridé comme chez les pékinois

– Oreilles : larges et tombantes et si abondamment poilues qu’elles se confondent avec le poil du cou.

– Mâchoires : de niveau ou bien légèrement « undershoot », le prognathisme supérieur constituant un sérieux défaut.

– Corps : entre le garrot et la racine de la queue, il doit être sensiblement plus long que la hauteur au garrot et bien en côtes ; le train avant est plus bas que le train arrière, le contraire constituant une faute grave.

– Pattes : courtes, musclées et droites, très poilues.

– Cuisses : musclées.

– Pieds : bien larges et bien poilus entre les doigts. Les pieds doivent apparaître massifs à cause de l’abondance du poil.

– Queue : doit être bien fournie, portée haut et joliment recourbée sur le dos.

– Poil : doit être constitué par un sous-poil laineux et un poil long, fin, soyeux, non ondulé et retombant jusqu’à terre chez les plus beaux sujets.

– Cou : court et fort.

– Poitrine : spacieuse

– Tablier et culotte : bien fournis et longs. Ils constituent une des caractéristiques les plus typiques de la silhouette de ces chiens.

 – Couleurs : elles sont toutes permises; pour le « noir et blanc », une flamme blanche sur le front et sur le bout de la queue sont rares et très appréciées.

– Dimensions : au garrot, approximativement de 23 à 26 cm.

– Poids : de 5 à 10 kg, mais de préférence de 5 à 7 kg.

Les différentes fonctions du shih-tzu

En Chine, outre son côté porte bonheur, signe extérieur de richesse, on mettait à l’origine le Shih Tzu dans les manches de tuniques pour se réchauffer les mains. Au Tibet, le chiot Shih Tzu accompagnaient les grandes expéditions des moines ou de la cour impériale. Doté d’une ouïe fine et d’une vue perçante, ils réveillaient et alertaient les dogues tibétains la nuit afin qu’ils se tiennent sur leur garde face à un danger imminent.

La « famille » du Shih Tzu

Pour différencier les types de chiens et faciliter ainsi l’organisation des expositions, la fédération cynologique internationale (FCI) a établi une nomenclature des races canines. Parmi les dix groupes qu’elle recense, le Shih Tzu lof appartient au neuvième. En rappel, voici les différents groupes :

– groupe 1 : chiens de berger et de bouvier (sauf bouvier suisse)

– groupe 2 : chiens de types pinsher, schnauzer, molossoïdes et bouvier suisse

– groupe 3 : terrier

– groupe 4 : teckel

– groupe 5 : chien de type spitz et de type primitif

– groupe 6 : chiens courants et chiens de recherche au sang

– groupe 7 : chien d’arrêt

– groupe 8 : chien leveur et rapporteur de gibier, chien d’eau

– groupe 9 : chien d’agrément et de compagnie

– groupe 10 : lévriers

Le neuvième groupe, chiens d’agrément et de compagnie, dans lequel on trouve le Shih Tzu, comprend aussi les races du tableau. 

Le présent et l’avenir du Shih Tzu

L’origine du Shih Tzu en France est récente puisqu’elle remonte à la fin des années 1970. Après un long démarrage, ce chien de compagnie est aujourd’hui à la mode, peut-être à cause des nombreuses stars d’Outre- Atlantique, tels que Liz Taylor ou Jerry Lewis, que l’on a pu voir à la télévision ou dans les magazines avec leur Shih Tzu. Beaucoup d’élevages ont vu le jour dans nos départements et des chiens ont été importés de Belgique, d’Angleterre et des Etats-Unis. Seul problème pour ce dernier fournisseur : exceptés les produits de quelques éleveurs de Shih Tzu « Lof », la plupart des Shih Tzu sont très différents du standard imposé par la fédération cynologique internationale. Là-bas, ils sont tellement sophistiqués qu’ils n’ont presque plus rien à voir avec ce que nous croyons connaître. Leur nuque est très longue donc les têtes sont extrêmement hautes. Les queues sont aplaties. Les top knot sont grossis à outrance avec du coton. Les cils sont maquillés pour leur donner des airs de Betty Boop. Plus grave : le nombre de dents n’a pas d’importance et beaucoup de sujets n’ont pas de menton.  

Ce type de Shih Tzu exotique est loin d’être laid, il est même plutôt élégant. Mais quel avenir pour la race ? Si jamais ces excentricités américaines venaient à envahir la planète, dans quelques années le « vrai » Shih Tzu serait en voie d’extinction au profit d’un chien totalement fabriqué qu’il serait nécessaire de rebaptiser. A quand les permanentes ou la coupe en brosse est-on en droit de s’interroger ? Le Shih Tzu étant une race orientale, l’éleveur de Shih Tzulof n’a pas le droit de renier ses origines. Sa mission est au contraire de l’améliorer sans effet paillette : préserver sa morphologie tout en embellissant les couleurs, en trouvant un poil idéal. Donner à ce formidable chien de compagnie toutes les qualités qu’il mérite. 

Les Shih Tzu d’aujourd’hui

Depuis 2000, après une cinquantaine d’années d’implantation en occident et une bonne décennie de succès en France, la race semble se stabiliser à 2 300 naissances inscrites au LOF par an. Dois-je dire « tant mieux » ? Les Shih Tzu lof d’aujourd’hui ont à pâtir de leur succès, phénomène qui entraîne inévitablement une certaine dérive, qu’il est grand temps de redresser. Parmi les défauts les plus fréquemment rencontrés, l’un des points les plus choquants chez un Shih Tzu se remarque à l’œil bien trop proéminent entouré de blanc. Tout au contraire, à l’origine, le chien Shih Tzu doit avoir un œil superbe, bien rond, sans aucune lunule blanche apparente, ce qui lui donne en pareil cas un regard effrayé au lieu d’être charmeur.

Si le prognathisme raisonnable est nécessaire à l’obtention d’un bon menton, on remarque trop souvent des dentures incomplètes, surtout mal alignées et même des mâchoires déviées, accompagnées d’une langue visible bouche fermée. Ceci devient grave. Les nez pincés peuvent entraîner de sérieux problèmes de santé. Tout au contraire, le standard précise : narines largement ouvertes pour que le chien respire !

Les corps ne sont plus en tuyau de poêle. Les poitrines se transforment en ogive, se rapprochant par trop de celles du Lhassa Apso. Attention aux angulations arrière incorrectes ; elles déforment la marche rendant le mouvement du chien atypique. On perd de vue les coussinets car la poussée arrière devient alors inexistante. La disparition de l’important effet d’équilibre (tête/queue) avec des fouets trop plaqués se fait aussi ressentir.

Un énorme travail en perspective pour les éleveurs français de Shih Tzu qui ont la passion et veulent respecter l’origine du Shih Tzu, mais ceci est bien connu, les vrai passionnés sont des battants !